REPORTAGE

Coloc ou coliving, de nouvelles manières d'habiter

De la colocation au coliving, le partage des espaces de vie et de travail concerne un Français sur quatre à un moment de son existence.
La rédaction
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Publié le 20 juin 2023
À lire aussi : Imed Robbana « Améliorer le vivre ensemble »

Un logement = une famille. Si le modèle d’un habitat classique, celui du chacun chez soi, reste la norme, il connaît aujourd’hui quelques brèches. La colocation, longtemps réservée aux étudiants, touche désormais d’autres tranches d’âge : de jeunes actifs en CDD aussi bien que des retraités avec de petites pensions, mais de grandes maisons. Au total, un Français sur quatre vit ou a déjà vécu en colocation, selon une étude BVA de septembre 2022. Crise du logement, baisse du pouvoir d’achat, aspiration à moins de solitude… les origines de cette tendance sont nombreuses. Et, phénomène nouveau, elle
témoigne à la fois d’une augmentation de la précarité et d’une recherche d’un mode de vie moins individualiste. Au-delà du partage des murs de son domicile ou de son bureau, certaines formules prévoient des espaces communs — dans une optique consumériste (c’est le cas du coliving, voir ci-contre), ou bien dans une démarche solidaire (c’est le cas de l’habitat participatif).

ASSOCIER LES CITOYENS

« L’idée est d’associer les citoyens à la conception, la production et la gestion de leur logement et de leur cadre de vie, explique Pierre-Étienne Faure, directeur de Faire-Ville, une société coopérative d’intérêt collectif d’Aquitaine. Ces projets prévoient la mutualisation de certains espaces, une salle commune, un atelier de bricolage, une laverie… » « Il faut un minimum de quinze logements pour amortir le coût de ces espaces communs et rendre l’habitat participatif accessible à tous », note Imed Robbana. Directeur général du Comité Ouvrier du Logement, une coopérative de production de HLM spécialisée dans l’habitat participatif, il se bat pour démocratiser cette forme d’habitat : « Il faut compter un surcoût de 1 à 2 % à la construction, assure le spécialiste, mais ensuite, les habitants font des économies de charge et bénéficient d’espaces communs qu’ils n’auraient pas eus dans un projet individuel classique. » Convaincue des atouts de ce modèle, la coopérative Faire-Ville se bat depuis une quinzaine d’années pour que les élus, les professionnels du logement et de l’urbanisme apprennent à faire avec les habitants. « Les aménageurs qui produisent des logements en grande quantité sont intéressés par cet état d’esprit qui peut aider à faire éclore une vie sociale locale, argumente Pierre-Étienne Faure. Nous travaillons aussi avec des opérateurs HLM et des élus pour banaliser ce type de démarche et convaincre que l’habitat participatif n’est pas réservé à une minorité. »

FAVORISER LA MIXITÉ

Un chemin parfois tortueux, comme en témoigne le projet entrepris par Régis Verley et un groupe d’amis, militants dans l’âme. Lancé en 2011, il a abouti huit ans plus tard à la construction ex nihilo de la résidence des ToitMoiNous, à Villeneuve d’Ascq, dans le nord. Composée de vingt-deux logements, elle concilie mixités générationnelle et sociale, avec des propriétaires en accession libre, d’autres en accession sociale et des locataires du parc social. Depuis 2019, sa cinquantaine d’habitants partage un jardin, une salle commune, une chambre d’amis, une laverie et un atelier de bricolage, et se rend des services (baby-sitting, prêts de voiture ou d’appareil à raclette…). Malgré ce bilan positif, la gestion du quotidien pose cependant des questions. « Il ne faut pas avoir une vision trop romantique de ce type d’expérience ; il y a des conflits et des problèmes de gouvernance face auxquels nous ne sommes pas beaucoup aidés, constate Régis Verley. Et quand un membre s’en va, il faut le remplacer, ce qui n’est pas évident, car on a beaucoup de demandes et peu de critères objectifs pour choisir. » L’association Faire-Ville a pris conscience de l’importance de cet accompagnement au fil de ses expériences : « De plus en plus d’opérateurs considèrent qu’il faut épauler les habitants au moins un an après la livraison, relève Pierre-Étienne Faure. Cela a un coût, mais somme toute minime par rapport au coût global de l’opération. » Sans compter que la plus-value de cet accompagnement est décisive pour garantir la qualité des relations qui se mettent en place à l’échelle de la résidence et plus largement du quartier qui l’entoure.

COLOCATION, COLIVING, HABITAT PARTICIPATIF : QUELLES DIFFÉRENCES ?

Dans la colocation, plusieurs locataires partagent le loyer d’un même logement. En coliving, encore peu développé en France, les habitants disposent de leur espace privé (une chambre, un studio…) et d’un accès à des services (ménage, wi-fi…) et/ou des annexes (sauna, bureaux…). Dans ce modèle, ils viennent consommer l’offre immobilière qui leur est proposée, contrairement à l’habitat participatif qui associe les citoyens à la conception et la gestion d’un collectif et qui répondra à leurs besoins.

HABITAT PARTICIPATIF, QUEL CADRE JURIDIQUE ?

La loi Alur, promulguée en mars 2014, a créé de nouvelles formes de sociétés d’habitat participatif, via la coopérative d’habitants ou la société d’attribution et d’autopromotion. La première a pour objectif la gestion du projet, de la construction à sa vie quotidienne ; la seconde se limite à l’achat et la construction du bien immobilier — elle peut ensuite déboucher sur une copropriété classique ou une coopérative d’habitants.

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