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Santé en France : face à l'insécurité sanitaire ces maires qui relèvent le défi

Ce vendredi de printemps, ils sont une quarantaine d’élus locaux et responsables d’associations réunis à Alès, cette cité cévenole dynamique toujours marquée par son passé charbonnier, comme en témoigne l’immarcescible terril qui la domine. Deux questions ont rassemblé ces femmes et ces hommes du haut Gard et de la basse Lozère : comment faire face à la pénurie de personnel sanitaire dont souffrent leurs territoires ? Et comment mettre un terme aux récurrentes mesures de régulation des urgences auxquelles est contraint l’hôpital public qui, pourtant, ne manque pas d’imagination et de courage pour maintenir et développer ses activités ? Dans le bassin alésien, où vivent près de 99 000 personnes, on dénombrait 71 médecins en 2021. On en recense aujourd’hui 55. Pas moins de 15 000 résidents sont privés de médecin traitant. En France métropolitaine, plus de 6 millions de personnes connaissent le même sort. S’est joint par visio à cette assemblée des déserts médicaux qui affectent 87 % de la population française, le Breton Vincent Le Meaux, président de Guingamp-Paimpol Agglomération, un territoire qui souffre des mêmes maux. Partout, des élus territoriaux multiplient les initiatives originales pour affronter cette insécurité sanitaire que l’État ne parvient pas à enrayer et dont Frédéric Dabi, directeur général de l’IFOP, pressent qu’elle pèsera de façon importante lors des élections municipales de 2026. Une France malade de sa santé. Diagnostic et remèdes.
André CICCODICOLA
André CICCODICOLA, Dominique SICOT
Publié le 26 juin 2025

Longtemps, la France s’est enorgueillie d’être en tête du classement des meilleurs systèmes de santé établi par l’Organisation mondiale de la santé, certifiant ses capacités à améliorer la santé globale et à répondre aux attentes des populations, le tout avec un financement équitable. Mais c’était en l’an 2000 ! Et l’OMS n’a pas depuis réitéré l’exercice qui portait sur 191 pays. Or, si l’on en croit d’autres sources, la France est malheureusement tombée de son piédestal. Selon l’indice de prospérité pour 2023, établi par le Legatum Institute (un think tank basé à Londres), elle ne serait que 20e sur 167 pays étudiés pour ses performances en matière de santé, derrière notamment plusieurs pays d’Asie et d’Europe du Nord. Et au 20e rang également au sein de l’Union européenne, selon le Panorama santé Europe 2024 (OCDE/Commission européenne), si l’on regarde le pourcentage de la population qui doit renoncer à des soins médicaux ou dentaires pour des raisons financières, géographiques, ou de temps d’attente.

Les signes de cette dégradation sont multiples, qu’il s’agisse de la médecine de ville ou des hôpitaux. Quelque 6 millions de Français n’ont pas de médecin traitant 1. Et un tiers de la population vit dans ce que l’on appelle désormais un désert médical. Décrocher un rendez-vous relève parfois du casse-tête. Dans un récent sondage Odoxa/Mutualité française (juillet 2024), 38 % des interrogés estimaient difficile d'obtenir un rendez-vous rapidement avec un généraliste (contre 22 % en 2017) et 77 % chez un spécialiste.

Les statistiques en matière de démographie médicale confirment ces tensions. Selon les normes retenues pour les comparaisons internationales, en 2022 la France comptait 3,7 médecins (en incluant les internes comme le font les autres pays) pour 1 000 habitants, soit moins que la moyenne de l’Union européenne (4,2 pour 1 000 habitants). Pire, cette moyenne médiocre cache de fortes disparités territoriales, comme le souligne l’Atlas de la démographie médicale 2025 établi par le Conseil national de l’ordre des médecins. Alors que Paris compte au total 889 médecins (généralistes et spécialistes) pour 100 000 habitants, les Hautes-Alpes 535,6 ou les Alpes-Maritimes 487, les départements situés au centre de la métropole sont beaucoup moins bien dotés (171 dans l’Eure, 179 dans l’Ain, 192,2 en Mayenne). Pour les seuls généralistes, alors que la moyenne nationale est de 117,81 pour 100 000 habitants, ce ratio tombe à 73,1 pour le Cher ou 75,4 pour la Seine-et-Marne. Les écarts sont encore plus importants pour les spécialistes. Pour les cardiologues par exemple, le ratio est de 13,3 pour 100 000 habitants dans les Hauts-de-Seine ou 13,2 dans les Alpes-Maritimes, mais de 2,6 en Haute-Saône ou 1,3 en Lozère. Pour les ophtalmos, de 22,2 pour 100 000 habitants à Paris ou 13 dans les Alpes-Maritimes, mais de 0,9 dans la Creuse ou même 0 dans le Lot. Pour la gynécologie médicale, 12 à...

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