Libérons nos provinces
Manuel pour transformer la France en République fédérale
Grégory Berkovicz, éd. L’Archipel, 2025
Petit manuel de fédéralisme
Grégory Berkovicz propose une révolution institutionnelle et son mode d’emploi : remplacer les régions administratives par des provinces dotées
d'une large autonomie législative, budgétaire et politique.
Dans Libérons nos provinces, Grégory Berkovicz signe un nouveau plaidoyer en faveur d'un fédéralisme à la ans Libérons nos provinces, Grégory Berkovicz signe un nouveau plaidoyer en faveur d'un fédéralisme à la française. Face à une décentralisation qu'il juge inaboutie et inefficace, l’auteur, qui intervient régulièrement dans nos colonnes, propose une révolution institutionnelle et son mode d’emploi : remplacer les régions administratives par des provinces dotées d'une large autonomie législative, budgétaire et politique. Ce plaidoyer était déjà connu des lecteurs, Berkovicz en avait fait son premier livre et l’avait défendu dans L’Inspiration politique face à Benjamin Morel. Cette fois, il s’attache à proposer une méthode pour mettre en œuvre ce fédéralisme à la française.
Un diagnostic pertinent
Grégory Berkovicz met en lumière un malaise bien réel : la reconnaissance insuffisante des territoires et de leurs habitants, des cultures locales et la centralisation persistante du pouvoir à Paris. Il défend l’existence d’une France des provinces, à la fois historique et culturelle, qui ne se retrouve pas dans les régions actuelles, issues d’un découpage technocratique : « Toutes les provinces de l’Ancien Régime ont leur propre culture et leur propre histoire, qui ne demandent qu’à ressusciter et à être relégitimées ». Il rappelle que « les compétences des collectivités territoriales ne le sont pas. Elles ne sont définies que par la Loi, c’est-à-dire sans aucune protection constitutionnelle. Par conséquent, une fois de plus, tout ce que des lois leur ont attribué, des lois peuvent du jour au lendemain le leur reprendre ». Il insiste sur l’absence d’autonomie fiscale qui limite toute autonomie réelle : « Aucune collectivité ne peut prétendre à l’exercice autonome de ses compétences si elle ne dispose pas de la capacité d’établir son propre budget, en dépenses bien sûr, mais aussi en ressources, y compris par emprunt ».
Commencer par la Corse
Plutôt que de parler de fédéralisme, l’auteur défend une provincialisation qui « favorise une plus grande proximité entre les citoyens et leurs représentants, renforçant ainsi la démocratie et la participation citoyenne. Elle offre une plus grande flexibilité et une plus grande adaptabilité du contenu des politiques publiques aux besoins et aux réalités de chaque territoire ».
Volontiers audacieux – ou provocateur –, Grégory Berkovicz propose d’abord un statut pour libérer la Corse ! Sur cette base, il étendra l’autonomie aux régions dont l’identité est déjà affirmée : Bretagne, Alsace et Pays basque. Aux septiques, il oppose les exemples de la Nouvelle-Calédonie et de la Polynésie française : si la République a su intégrer des régimes d’autonomie outre-mer et même du droit coutumier, pourquoi ne pas appliquer ce modèle à la métropole ? Ainsi, « la Nouvelle-Calédonie est exemplaire en termes de respect des communautés culturelles dans toute leur diversité. Elle reconnaît quarante langues kanakes, la culture kanake est enseignée à l’école, et le centre culturel Tjibaou de Nouméa est consacré à préserver les traditions mélanésiennes ».
Comment résoudre les inégalités
La solution préconisée par Grégory Berkovicz tranche évidemment avec la tradition institutionnelle française. Dans le contexte actuel, on peine à voir quelle majorité politique se risquerait à remettre en cause notre organisation républicaine.
Pour assurer la réussite de sa réforme, l’auteur cite les modèles espagnol et italien. Après la dictature franquiste, l’Espagne a en effet accordé une large autonomie aux provinces : une garantie contre le séparatisme, estime Grégory Berkovicz, qui omet toutefois d'aborder les tensions régionalistes et les difficultés récentes liées aux mouvements séparatistes, par exemple en Catalogne ou en Italie du Nord. L’ouvrage passe également vite sur les inégalités structurelles entre territoires : transport, aménagement du territoire, réindustrialisation, emplois, santé… En libéral, Grégory Berkovicz assure que l'État compenserait les inégalités de ressources via la péréquation financière et un revenu universel ajustable au niveau provincial…
Quoi qu’il en soit, Libérons nos provinces a le mérite de relancer le débat sur la place des territoires dans la République. L’ouvrage questionne également l’identité locale, la reconnaissance des langues régionales et la participation citoyenne. « L’identité locale ne doit plus être opposée à l’identité nationale, mais au contraire en constituer une composante », écrit Grégory Berkovicz. Reste à savoir sous quelle forme cette coexistence doit s’organiser.française. Face à une décentralisation qu'il juge inaboutie et inefficace, l’auteur, qui intervient régulièrement dans nos colonnes, propose une révolution institutionnelle et son mode d’emploi : remplacer les...