INNOVATION

Cahors se distingue en louant des logements du XIIIe s. ultra modernes

Le centre-ville de Cahors perdait des habitants dans ses quartiers médiévaux. Mais le travail de l’agglomération et de ses partenaires, pour combiner rénovation énergétique et restauration du patrimoine, porte ses fruits.
La rédaction
La rédaction
Publié le 4 avril 2022

L’Hexagone regorge de communes avec des quartiers anciens voire médiévaux : ruelles pavées étroites, maisons mitoyennes à colombages… Un patrimoine qui séduit les touristes et les passionnés d’Histoire, mais plus difficilement les familles à la recherche d’un logement ou les investisseurs immobiliers.

L’ampleur des travaux nécessaires pour adapter ces bâtiments aux attentes actuelles (de luminosité, d’isolation, de taille des pièces, etc.) des occupants, combinée aux contraintes généralement imposées par le secteur patrimonial (Plan de sauvegarde et de mise en valeur, Architectes des bâtiments de France, etc.), rebute bien des acheteurs. Résultat : ces quartiers de centre-ville ont tendance à se dépeupler.

Cahors veut reconquérir son centre historique

C’est l’un des combats de la communauté d’agglo du Grand Cahors depuis 2015. En sept ans, environ 900 logements ont été rénovés par leurs propriétaires, sur les quelque 6000 bâtiments du centre-ville cadurcien. Parmi eux, près de 200 étaient des bâtiments vétustes et inhabités.

Dans le centre cadurcien, le bâtiment restauré qui sert de modèle depuis 2021. Photo : Pierre Lasvenes.

L’agglomération a amorcé une politique de soutien à l’éco-restauration au bâti ancien nommé Enerpat -contraction d’énergie et patrimoine. Cela s’est concrétisé en 2015 par une prime locale de 2000 € pour tout foyer accompagné dans une Opah-RU (opération programmée d’amélioration de l’habitat et de renouvellement urbain), en complément des aides de l’Anah. Depuis 2020, l’aide du Grand Cahors s’élève à 15 % du montant des travaux éligibles calculés avec l’Anah.

Avec une contrainte : qu’ils utilisent des matériaux biosourcés, notamment des isolants végétaux.  “Ils coûtent plus cher que de la laine de verre mais durent plus longtemps et surtout sont indispensables pour que les murs médiévaux, qui ont naturellement des transferts d’humidité, ne se détériorent pas comme c’est le cas avec un isolant étanche”, explique Sophie Gomez, chargée de l’habitat privé au Grand Cahors.

Une expertise scientifique locale

Ces connaissances sur le bâti ancien et les matériaux qu’il faut y associer, les équipes carduciennes les ont acquises grâce à la thèse d’une doctorante de l’Insa Toulouse. “Après des modélisations, elle a testé différents matériaux, sur des bâtiments de Cahors et en laboratoire”, ajoute-t-elle.

Pour trouver les matériaux les plus adaptés, les équipes se sont focalisées sur les performances d’isolation mais aussi les plantes produites localement. Des échanges ont eu lieu avec des agriculteurs de la région pour la disponibilité du chanvre notamment.

L’isolation intérieure est composée de chaux et de chanvre local. Photo : Pierre Lasvenes.

En parallèle, il a fallu structurer la filière locale du bâtiment. “En 2015, les propriétaires motivés à utiliser des matériaux biosourcés étaient freinés par des difficultés à s’en procurer dans les magasins ; et à trouver des architectes et des artisans qui savaient les utiliser”, reprend Sophie Gomez. Des ateliers ont donc été organisées avec ces professionnels. 

Après la théorie, le cas pratique

En 2016, Cahors est sélectionné par projet européen Enerpat-Sudoe. L’agglo bénéficie alors de 1,4 million d’euros du fonds Feder, pour démontrer, avec une restauration modèle, qu’il est possible de transformer un bâtiment du XIIIe siècle en des bureaux et des logements confortables. Des expérimentations similaires ont été menées à Porto au Portugal et à Vitoria-Gasteiz en Espagne.

Au programme, à Cahors : fusionner deux maisons vétustes (afin que chacun des 4 étages ait une superficie plus étendue), isoler les murs par l’extérieur et l’intérieur avec un enduit chaux-chanvre, refaire la charpente en bois et la toiture avec des panneaux solaires, installer un monte-personne, une chaudière collective et des fenêtres double-vitrage en bois.

Depuis début 2021, les 300 m² sont entièrement restaurés. Le rez-de-chaussée et le 1er étage accueillent la Maison de l’éco-restauration, qui conseille les particuliers dans le cadre de l’Opah-RU. Des locataires ont emménagé dans les étages supérieurs. Les logements doivent être équipés prochainement de capteurs (de température, d’humidité, de CO2,…) pour vérifier l’efficacité énergétique.

Dans le bâtiment démonstrateur. Photo : Pierre Lasvenes.

De nouveaux chantiers de rénovations devraient avoir lieu, sans que le Grand Cahors soit, cette fois, maitre d’œuvre. Mais les équipes de l’agglo continuent d’accompagner des propriétaires hésitants face aux travaux à entreprendre. “On leur donne des recommandations, précise Sophie Gomez. Il faut parfois trouver des compromis entre une rénovation énergétique parfaite et ce qui serait idéal pour la restauration du patrimoine. Mais les choses avancent. Des projets sont actuellement envisagés par des bailleurs sociaux, mais aussi par des investisseurs qui reviennent.”

Le centre-ville s’est déjà métamorphosé en 10 ans et devrait poursuivre cette dynamique avec encore plus de nouveaux habitants.

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